Deux mois que nous sommes installées dans le sud, et, Halloween passé, l’hiver pointe enfin le bout de son nez. Enfin finis les après-midis à plus de 25 degrés ! Danse de la pluie, les plantes pourront boire !
Je les fais souvent rire, avec mon bonnet. Comment ça, je le garde même en intérieur ? On a lancé le radiateur dans notre bureau à la mairie, un petit grille-pain où l’on vient coller nos fesses de temps en temps, tasse de thé à la main, avec pour excuse qu’il faut discuter sur l’avancement de nos projets.
La nuit arrive tôt. Crépuscule des activités en extérieur, après 17 heures. Et avec ce noir qui nous recouvre, l’aube des premières frustrations de la vie au village. Certains projets n’aboutiront pas : nous ne réintroduirons pas d’écrevisses dans nos ruisseaux, les écrevisses américaines – invasives et porteuses de la peste de l’écrevisse – ont déjà envahi la vallée ; de toute façon il n’y a pas assez d’eau l’été. La station d’épuration installée il y a quelques années a décimé les dernières écrevisses à pattes blanche. Le mal est fait, on ne peut pas y remédier.
Les conversations prennent aussi un tournant … embêtant. On entend dire qu’il faut mitrailler les arabes, que les gitans sont tous des voleurs. On note que quand même, à cette réunion des maires de l’agglomération, il n’y a pas beaucoup de femmes, heureusement qu’on est là pour rééquilibrer les choses ! Et puis ces hommes qui, sécateurs ou tronçonneuses en main, veulent toujours avoir raison, et incarnent un peu de cette masculinité malsaine que je fuis tant… Un petit rappel à la vie, en somme !
Mais en ce début d’automne, ça commence à pétiller, niveau projets. Les fortes températures reviennent quelques jours (coucou les 25 degrés mi-novembre !), et avec le ciel bleu, de belles avancées. Au cours d’une collecte d’olives, on arrive à convaincre le maire de mettre en place certaines de nos idées. On apprend comment communiquer pour faire passer nos idées, qui ne sont pas toujours très en vogue. Les viticulteurs ne veulent pas planter de haies pour favoriser la biodiversité ? Nous allons mettre en place des retours d’expérience avec des viticulteurs en bio et des formations avec des professionnels de l’agroécologie. Parce que nous ne sommes pas des techniciennes expérimentées, notre voix ne porte pas. Alors, on la délèguera à des personnes qui seront écoutées !
Petit à petit, on se construit un réseau. Chaque personne que l’on appelle ou que l’on rencontre a très envie de nous aider, et nous pressent de les recontacter dès que nous avons de nouvelles questions ou besoin de plus d’accompagnement. Bref, on rebondit !
Marion Chetaille